Mirror Teeth est une pièce écrite par Nick Gill qui brosse très cruellement le portrait d’une famille raciste et bornée en pleine explosion. À travers cinq personnages, sont abordés des thèmes actuels et récurrents comme le capitalisme patriarcal et ses répercussions sur les hommes, les femmes, racisés ou non.
Nous sommes au cœur même d’un système qui rappelle étrangement le nôtre, en plus cruel, en plus absurde, en plus violent. Pour Sarah Messens, il est essentiel de monter cette pièce car elle se place du côté des dominants pour les observer. Cela permet de travailler sur les rapports de force et de pouvoir. De comprendre les situations de négociations et de récupérations idéologiques au profit d’un capitalisme qui n’en peut plus de croître, dont tout le monde prédit la fin, sans jamais qu’elle n’arrive. Avec cette famille comme image fractale de la société, nous observons l’autorité se barricader derrière ses certitudes et étouffer sous le vernis de la bourgeoisie.
« À l’heure où nous sommes à nouveau cloisonnés dans nos intérieurs supposés rassurants et hygiéniques, j’oscille entre suffocation et résignation. Les perspectives d’avenir s’arrêtent à la porte du frigo et le tissu social s’émiette derrière la distance physique. Le récit commun n’est plus dirigé que par la peur, et chacun invente sa mythologie au sein de son biotope individuel. Dans Mirror Teeth, je m’emploie à pousser la logique de repli et d’angoisse à son paroxysme, à la manière des scientifiques qui observent des rats de laboratoire s’entretuer derrière une vitre sans tain. Mais pourquoi résumer l’être humain à un rongeur psychopathe plutôt que célébrer l’espoir de lendemains qui chantent ? D’abord parce que d’autres le font bien mieux que moi. Ensuite parce que les récits horrifiques sont ceux qui ont le plus secoué mes certitudes et remis en question mes comportements. J’espère, par mon travail acharné et ambitieux, apporter ma pierre à l’édifice. »
Sarah Messens