SNG (Natacha Guiller)

Paractivités Survives

Résidence d'écriture

La danse c'est la voix de la marche qui suspend mon bégaiement à l'arrivée sur scène.

Toute ma vie est un trafic constant. Trafic pour se bricoler un corps qui tient debout visuellement alors qu'il part en lambeaux dès que la porte de mon hospice est franchie. J'arnaque jusqu'à mes propres organes en dissimulant les nourritures mélangées, pour faire passer outre mes intolérances dans le combo d'un repas. 

Je danse pour oublier la douleur, vomis pour effacer les crampes, ne m'habille qu'à demi car j'ai mal et fais des blagues pour ne pas mourir. Je suis dupeuse de ouf.

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Si l'excessivité des perceptions sensorielles m'apparaît en tout et pour plainte un don, la chance, une gustativité trait au personnage débordant, remodulation élevée de ma façon d'être au monde, le port d'écouteurs A - N - R constitue - à mon initiative débrouillée en peine - la première pierre régulaire d'assourdissement de ces sens, pour peaufiner  l'apaisement prompt à traduire au calme ce que vous incaptez de mes maux et multiples annonces, alors là merci la technologie humaine.

Je suis déjà bien au courant de m'être dictée des choses dans l'écriture, quant à en entendre davantage, j'imagine que ma plume est en quelques sortes mandatée, en ce sens, qu'on considère que j'incarne la juste porte-parole pour la transmission par laquelle je suis convoquée. En cela, ce doit être perçu comme un honneur doublé d'un handicap. 

Le travail de reprisage contrôle mental vise à diviser, isoler les sons, ou plus imaginativement les amalgamer, prétendre au cerveau l'unisson, l'harmonieux hasard, et surtout devenir le super bon public qui assiste à ce concert de tête parce qu'il avait anticipé la réservation de son billet pour. 

Aussi, en détournant son mode cérébral barricadiste, lui faisant croire à une ambiance sonore conjecturée supérieure, on contribue à limiter le sentiment de maltraitance à l'ouïe. 

Ce travail d'arnaque de l'esprit nécessite un enthousiasme dans l'effort d'autodupe constant vers une flexibilité automatique ou désensibilisation immédiate, permettant l'accommodation autonome - sur piston de rire interne - aux nuisances perpétrées (perpétuelles) et ainsi une sensation de simplicité de souvivement sociétal en l'espace commun. 

L'adhésion fictionnelle est primordiale dans la stratégie déviée des raisons de survenue des sons ; leur fréquence, allure et taux de désagréabilité doivent être romancés. 

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Sur la scène, tout le monde se tait, tout le monde se calme et m'écoute. C'est l'unique endroit où l'espace de parole, le débit, les flux, les silences sont respectés. C'est l'unique espace où je peux parler sans que ce soit en climat de guerre parce que je suis spatialement légèrement surélevée ou dans l'arc-de-cercle, parce que je suis chronométrée et programmée. Parce que ma parole est inscrite, le créneau bloqué, la période consacrée. Sur scène, ma parole est prise au sérieux. 

Le silence obscur s'ensuit aux espaces vides comblément moi, débitant à tout allure des mots et des gestes inappropriés ou hors de mon contrôle. Le public ne dit mot, m'observe - sans aucun doute - ce que je ne peux toutefois vérifier puisque je ne regarde qu'ailleurs, dans le vif du son et de la salle, je ne vois rien quand tout le monde me rive. Il n'y a pas un rire qui accompagne mes glissées feintes brûlant la vitesse des flammes, l'ironie sous l'esquimau croque du rythme bancal sur les aspérités langagières de l'invention de fragmes manquant au trépignement du corps porté à sa staticité bouillonnante. 

NB : Je ne supporte pas le bruit des tiges de plantes qui fouettent la baie vitrée dans mon appart'.