Brune Bazin

La pensée molle - tentative de sursaut poétique avant l’effondrement

Résidence de création

« Mou » Définition : Nom vulgaire du poumon de certains animaux, et particulièrement du veau.

S’inspirant des mots de Matéo Alaluf dans son livre Contre la pensée molle, Dictionnaire du prêt-à-penser (« Il fallait une pensée molle - qui englue le cerveau social, qui rende tout simplement imprononçables et interdits de séjour mental tout terme qui s’oppose à la marchandisation de la société - il n’y a pas et il ne peut plus y avoir d’alternative : services publics, écoles, justice, culture, tout doit y passer. »), Brune Bazin s’empare des endroits du « prêt-à-penser » que nous acceptons, véhiculons, reproduisons en mettant en place une écriture de plateau à la croisée entre performance et poésie.

Après une première étape aux Halles de Schaerbeek pendant la pandémie, lors des journées Still Standing de février 2021, le boson ouvre ses portes à cette performance pour intenter un déminage de la pensée (et de l’action) molles, ainsi que de l’expropriation langagière qui détruit nos écosystèmes mentaux, sociaux et imaginaires.

 

Avant de faire entrer le personnage principal, on m’a demandé de vous proposer une petite mise en pratique de pensée molle. Je vais faire l’exercice avec vous. Ne trichez pas, tricher c’est mal. Voilà c’est un exercice psycho-physique qui va nous demander à toutes et tous une grande concentration.

Vous allez choisir une partie de votre corps qui soit une partie molle, la plus évidente ne trichez pas. Moi c’est les fesses d’office. Bon. Et petit à petit, cette partie molle va prendre toute la place dans le corps. Jusqu’au cerveau, jusqu’au cerveau. Cerveau qui va se rouler, se vautrer dans la partie molle.

Puis vous saisissez une petite pensée assez molle au passage, une pensée qui ne fait pas de remous : « c’est la faute à pas d’chance par exemple » ; « je voudrais bien vous y voir » ou « si c’n’est toi, ce sera ton frère » ; « Oh Boh ! A quoi bon ! » - Gardons la première - Pour augmenter les effets de cette pensée molle, vous pouvez visualiser beaucoup de petites fenêtres avec des personnages à l’intérieur qui vous répètent, avec experts à l’appui que « c’est la faute à pas de chance ».

Imaginez alors une crise.

L’espace devient mou.

La flèche du temps s’amollit.

Vous y êtes.

- Extrait de l'écriture en cours