Victor Huon

Coagulations - Août et décembre 2021

Résidence d'écriture

" Souvent, je trouve des objets. Dans des brocantes. Des livres, sur le trottoir. Tous contiennent en eux les traces d’une vie vécue, d’une existence passée et oubliée. Je les agrège, les observe et les classe pour les laisser coaguler et former une constellation d’objets-traces. Ensuite, j’enquête pour reconstituer leur récit propre. "

Victor Huon interroge la réception de l’urgence climatique et la manière d’y réagir pour vivre le présent. Le texte devient le terrain de l’expérience du monde en déliquescence. Un espace de vie dont les murs s’écaillent et les fondations se déplacent, une maison que l’on vide après une disparition et où ne resteraient que quelques objets insignifiants, de simples souvenirs invendables.

Ces objets, ces traces d’une vie vécue sont les points de départ du récit de Victor Huon. Une archéologie du quotidien qui permet d’écrire dans la mémoire la vie passée d’inconnus. Une expérience littéraire empreinte de l’urgence à garder une trace de ce qui disparait pour lutter contre la réalité qui attend.

J’appartiens à la première génération dans l’histoire contemporaine à observer le futur et à y voir un avenir plus sombre que celui vécu par ma mère et ma grand-mère avant elle. Comment vivre le présent avec la conscience permanente de la lente désagrégation du monde et de l’inertie d’un capitalisme néolibéral qui enferme toujours plus ? Les réponses, je les cherche dans l’écriture. C’est à cela que s’attaque ce récit. Comprendre la réaction qui se joue dans l’esprit d’un narrateur vivant son monde en désagrégation, hanté par l’impuissance et décidé à archiver le monde d’avant. Un geste quasi désespéré. 

 

Les objets...

Une cassette audio 120 Majestic sur laquelle est inscrit « conversation avec Maryse 08/09/1979 ». Sur ces bandes Daniel B. a enregistré deux appels téléphoniques avec Maryse, sa petite amie de l’époque, sans la prévenir. Trouvée dans une brocante à Braine-le-Comte.

Une seconde cassette audio C-90 Majestic, où Daniel B. appelle la mère de Maryse car celle-ci le quitte. Trouvée au même endroit, une semaine plus tard.

Une bande de négatifs avec les images d’un enfant à la mer, trouvée sur un trottoir.

Une série de cartes postales envoyées entre 1968 et 1969 par un certain Alfredo à Monique, traductrice résidant à Uccle. Visiblement son amour de jeunesse italien. Achetée aux Petits Riens.

Un album photos d’une soirée de famille dans les années 1990, toutes prises ce soir-là. Trouvé sur un sac poubelle.

Une reproduction 10x15 d’une photo de mariage avec, au verso, les états d’âmes du mari. Destinée à une connaissance du passé. Commence par : « J’ai été troublé par ton appel ». Trouvée dans le tome I des œuvres complètes de Dino Buzzati.